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A propos de Phuket

Pourquoi donc rester si longtemps sur cette île après la tragédie du 26 décembre ? Difficile à dire...

Le farniente, c’est fatigant

Voilà donc presque trois semaines que nous sommes à Phuket. Les journées s’écoulent à un rythme indolent. Lorsque nous avons le courage de nous lever assez tôt, nous allons une première fois à la plage. L’après-midi, il fait souvent trop chaud pour faire autre chose que bouquiner, trier les photos, écrire quelques lignes pour cette page ou faire la sieste dans la fraîcheur de l’hôtel avant de tenter une deuxième sortie au bord de la mer en fin de journée. Il m’arrive même parfois de faire un soupçon de jogging le long de la plage (et hop encore une bourrasque de neige en Helvétie, ceux qui me connaissent savent que j’ai horreur de courir). Et à côté de ça je me gave de mangues et d’ananas, les fruits exotiques, enfin locaux, sont vraiment trop bons ici. A part ça, voyageant avec un sportif, j’ai sérieusement réduit ma consommation de bière, ce qui n’est pas plus mal.

La vie est donc très dure ici, nos journées nous confrontent à des choix terribles, pour savoir à quelle plage aller, dans quel restaurant manger, quel cybercafé choisir…

Vague à l’âme

J’ignore si c’est parce que c’est à nouveau les vacances en Europe, ou si les agences de voyages ont rassuré les touristes ou cassé les prix sur la Thaïlande, mais depuis une semaine le nombre de touristes a fortement augmenté sur l’île. Les chaises longues et les parasols sont à nouveau alignés sur les plages, beaucoup de restaurants ont rouvert, la circulation a augmenté, Phuket recommence à ressembler à ce que j’en avais connu il y a trois ans.

Nous évitons à présent Patong, surtout le soir, car L. ne supporte plus le harcèlement sexuel dont il fait l’objet dès que je m’éloigne de lui. Les demoiselles de charmante compagnie ne laissent aucun répit à tout mâle non accompagné. Moi je ne m’en rends quasiment pas compte, puisqu’on me laisse tranquille, et qu’elles se font discrètes quand il est avec moi. L. m’a même dit avoir été accosté en route, alors qu’il dépassait trois thaïlandaises sur une moto ! Il faut dire que le début de l’année a été une période de vaches maigres, les touristes ayant déserté l’île, et un grand nombre de personnes ayant tout perdu, des femmes soudain veuves ou se trouvant avec des neveux ou nièces orphelins à charge.

Cependant, certaines plaies mettront du temps à cicatriser. Notre hôtel se trouve sur le flanc d’une colline, le long de la route qui relie Kamala à Patong. Si cette dernière ville a beaucoup souffert du tsunami, qui a fortement endommagé tous les bâtiments du front de mer, Kamala a été littéralement balayée par la vague. L’hôtel a ouvert le 25 décembre, et toutes ses employées ont perdu des proches dans la catastrophe. La propriétaire, une thaïlandaise mariée à un italien, a aidé les gens tant qu’elle pouvait, hébergeant près d’une centaine de personnes dans son hôtel et sur son terrain, parmi les larmes et les cris. Beaucoup de gens étaient allés secourir des enfants et d’autres personnes emportées par la première vague, et n’ont pas pu échapper à la deuxième. Sur un grand terrain entre la route et la plage, de petits piquets à peine visibles indiquent l’emplacement de tombes.

Un français m’avait dit que les thaïs ne savent pas exprimer leurs sentiments, et que souvent ils rient car ils ne savent pas pleurer. Les gens qui nous ont raconté ce qu’ils ont vécu l’ont toujours fait avec émotion, mais qui sait quelles souffrances se cache derrière ce masque souriant ?

Courageusement, les gens retapent ou reconstruisent leurs maisons, mais les moyens financiers sont moins importants que dans les hauts lieux touristiques et le village est encore un vaste champ de désolation. Les journaux annoncent des sommes que le gouvernement va verser pour aider les victimes, mais pour l’instant personne ne voit la couleur de cet argent et la vie continue tant bien que mal. Il est certain que plus un établissement rouvre rapidement ses portes, plus vite il refait du chiffre. Seulement pour cela il faut de l’argent, et à nouveau ce sont les plus gros qui tirent leur épingle du jeu, ayant fait appel à des ouvriers cambodgiens ou laotiens (eh oui, chaque pays a sa main d’œuvre bon marché) pour travailler jour et nuit à la reconstruction des bâtiments.

Ce qui est étonnant, c’est de voir à quel point la civilisation humaine est fragile, car si dans les villes et villages les œuvres humaines ont été dévastées, les régions côtières où la nature est encore reine portent à peine les marques de la vague. Quelques branches cassées, des débris de bois et de coraux sur la plage, la nature semble presque avoir concentré son énergie sur ce qui n’en faisait pas partie.

Voilà, une page qui peut sembler sordide, et que je choisis de ne pas illustrer, car je ne me sens pas l’âme charognarde et ne veux pas prendre de photos du malheur d’autrui.

Commentaires

1. Le lundi, 28 février 2005, 08:53 par BigGrizzly

:: Voilà, une page qui peut sembler sordide, et que je choisis de ne pas illustrer,
:: car je ne me sens pas l’âme charognarde et ne veux pas prendre de photos
:: du malheur d’autrui.

Je ne suis pas certain que j'aurais été capable de la même sagesse...